DIDON ET ENÉE
Philippe Commentaires 1 commentaire
Dimanche 23 février 2025 à 15h
GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE
DIDON ET ENÉE
Opéra de Henry Purcell
Direction musicale Emmanuelle Haïm & Atsushi Sakai
Henry Purcell (1659 – 1695) n’est pas tellement à l’affiche de nos salles d’opéra. C’est donc l’occasion rêvée de redécouvrir ce compositeur en assistant à cette représentation de Didon et Enée.
L’œuvre est assez courte (1 heure environ). L’Opéra de Genève a donc eu l’excellente idée d’agrémenter cet opéra d’intermèdes dansés qu’il a confié au collectif de danse-théâtre bruxellois bien connu : Peeping Tom.
Emmanuelle Haïm, spécialiste s’il en est de la musique baroque, dirigera son ensemble, Le Concert d’Astrée, en association avec le compositeur et violoncelliste japonais Atsushi Sakai (composition et conception musicale) et Franck Chartier (mise en scène et chorégraphie).
D’une durée d’1h50 environ sans entracte, ce spectacle chanté en anglais sera surtitré en français.
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One thought on “DIDON ET ENÉE”
Didon et Énée revisité
Ou « Les Nénés de la Dodue Didi »
En ce dimanche 23 février 2025 nous avons donc assisté au Grand Théâtre de Genève à l’exécution de Didon et Énée de Purcell.
Et ce jour-là, au Grand Théâtre, tout était sens dessus dessous.
« Le spectacle contient des images fortes, de la nudité et des scènes à caractère violent ou sexuel pouvant heurter la sensibilité de certains spectateurs. » Cet avertissement, diffusé par en dessous, on aurait bien aimé en avoir eu connaissance en temps utile, c’est-à-dire soit à la présentation de la saison 2024-2025 ou à l’ouverture de la billetterie de Didon plutôt que le soir de la première !
Mais fallait pas compter dessus ! Le Grand Théâtre a besoin de sous ! Donc priorité à la recette que cette annonce prématurée aurait pu compromettre. Il valait mieux allécher le spectateur en affichant « Le Concert d’Astrée dirigé par Emmanuelle Haïm » sans s’épancher sur le reste.
Qu’on ne vienne pas nous dire que la teneur sulfureuse de ce spectacle n’a été connue que tardivement. Il était prêt depuis 2020 et n’avait pu être exécuté qu’une fois à cette époque pour cause de COVID devant un auditoire clairsemé.
Manifestement, l’objet de cette annonce n’était que de prévenir quelques récriminations sur l’air de « on vous avait prévenu » (le soir de la première !).
Bref, cette annonce, pas spontanée pour deux sous, nous a déçu.
Là-dessus, un critique complaisant a cru bon de venir au secours du Grand Théâtre (solidarité sainte de l’artisanat) en déclarant « La mythologie est pleine de sexe et de violence. Faudra-t-il bientôt afficher des avertissements dans tous les musées ? » Certes, mais quand on admire ces tableaux et ces sculptures mythologiques, on n’est pas importuné (restons poli !) par des cris glauques et caverneux qui saturent nos esgourdes (d’ailleurs déjà pas mal ensablées) et ne nous mettent pas en bonne disposition par la suite pour écouter sereinement la musique de Purcell. On ne déguste pas un Saint Emilion Grand Cru sur un plat de viande avariée.
Un autre critique a écrit : « La mise en scène du collectif Peeping Tom se caractérise par une esthétique très visuelle, presque cinématographique. » A ce compte-là, le spectacle aurait pu s’appeler « L’Arrière-Train Sifflera Trois Fois ».
Didon et Énée ne durant que 45 minutes, plutôt que d’essayer de meubler pour satisfaire les phantasmes d’un metteur en scène obsédé, on aurait pu y adjoindre une autre « petit » opéra nous aurait permis d’apprécier un vrai Didon et Énée qui plus est joué par ce qui se fait en ce moment de mieux en matière de baroque (Le Concert d’Astrée et Emmanuelle Haïm) et ensuite laisser carte – blanche au défoulement du metteur en scène. « Les Mamelles de Tirésias » aurait peut-être pu convenir. Ça dure 1 heure, c’est assez déjanté et ça reste (au moins le titre) dans le domaine de la mythologie. DiDi aurait pu tout autant dévoiler tout son talent. Un petit entre-acte aurait permis de nous esquiver en douceur.
La coopération, bras dessus-bras dessous, entre le metteur en scène et Emmanuelle Haïm forme un étrange attelage, associant Peeping Tom (Tom le VOYEUR en français) et Astrée (déesse grecque dont la sœur est l’allégorie de la PUDEUR).
Au début, on se demandait si c’était du lard ou du cochon. On avait été alerté par l’avertissement mentionné plus haut mais la chorégraphie, façon Rap, était bien servie par des danseurs ma foi assez convaincants. Cela m’a rappelé une représentation des Paladins de Rameau où les danses étaient toutes façon Rap et ça passait très bien. Mais rapidement on s’est rendu compte que c’était du lard (quand la Dodue Didi s’est dévoilée) et du cochon (quand les autres se sont exhibés).
Heureux les musiciens du dessous (dans la fosse d’orchestre) car ils n’ont pas pu voir ce qui se passait au-dessus : La dodue Didi enlevant ses dessous et les autres se tapant dessus.
Quant aux chœurs, installés dans la mezzanine, ils étaient bien au-dessus de ça.
Dans ce genre de spectacle, tout est affaire de symbole plus ou moins ésotérique. Pendant la séquence « du plateau à barbe » au cours de laquelle Monsieur Sakai se fait copieusement shampooiner, ainsi que son violoncelle (pauvre violoncelle qui n’avait rien demandé), je me suis demandé si le metteur en scène n’avait pas voulu suggérer à Monsieur Sakai que ses interventions étaient quelque peu rasoirs.
Quant à moi, j’avoue que certaines improvisations de Monsieur Sakai m’ont fait froid dans le dos.
Le metteur en scène est belge, mais n’allez pas croire que je méprise les artistes belges. Raymond Devos et Jacques Brel étaient bien belges. Sans oublier Hergé, le papa de notre bien aimée Castafiore qui, si elle avait chanté dans ce spectacle, nous aurait certainement interprétée en bis « L’air des Bijoux de Famille ».
Il faut quand même féliciter Le Concert d’Astrée et Emmanuelle Haïm pour la qualité de leur prestation. Mais je ne peux m’empêcher de me demander : Que faisaient-ils donc dans cette galère ?
A la fin tout le monde s’est présenté à peu près bien habillés et il y a eu des applaudissements. Il faut dire que ce sont les choristes (irréprochables) qui ont commencé cette séquence. Ensuite quelques huées puis de nouveau des applaudissements pour l’orchestre et sa cheffe (également irréprochables).
C’est peu dire que ce spectacle en dessous de tout en a déçu plus d’un, surtout à Genève où j’ai pu entendre des spectateurs qui sortaient en protestant.
Si vous pensez que mon propos est un peu mal à propos, je vous dirais :
« Spectacle idiot, critique idiote »
PS : Par décence, je n’ai pas illustré mon papier de photo.